Message de Sa Sainteté le Pape au Secrétaire général des Nations Unies pour la journée internationale de l’alphabétisation
Créer une culture des lettres : Message de Jean-Paul II à Javier Perez de Cuellar pour l’année internationale de l’alphabétisation
Rome, 3 mars 1990
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Dans le cadre de l’année international de l’alphabétisation, le Pape Jean-Paul II écrit au Secrétaire général des Nations Unies pour lui faire part de ses réflexions sur ces enjeux. Notant que l’analphabétisme croît à travers le monde, il insiste sur le fait qu’il ne s’agit pas seulement d’apprendre les lettres à une génération. Ils faut les cultiver et les faire fructifier à tous les niveaux dans chaque société.
À Son Excellence Monsieur Javier Perez de Cuellar,
Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies,
À l’occasion de l’année internationale de l’alphabétisation, décidée par l’Assemblée générale des Nations Unies et confiée à l’Unesco pour sa mise en œuvre, je tiens à exprimer le grand intérêt du Saint-Siège pour cette initiative et le soutien qu’il désire lui apporter.
On doit, hélas, constater que, malgré les efforts des nations et des organisations internationales, le nombre des analphabètes s’accroît encore, car la scolarisation, en bien des régions, ne se développe pas actuellement au même rythme que la population elle-même. D’autre part, l’analphabétisme est présent aussi, de manière moins perceptible, dans les pays industrialisés, non seulement du fait de l’immigration de personnes non scolarisées mais aussi parce que des jeunes n’ont pu parvenir à maîtriser durablement la lecture et l’écriture au cours de leurs années normales de formation.
Toute personne privée de la possibilité d’apprendre à lire, à écrire ou à compter se trouve lésée dans son droit fondamental à l’éducation. Elle demeure en situation de désavantage dans ses rapports avec la société. L’analphabétisme constitue une grande pauvreté ; il est souvent synonyme de marginalité pour des hommes et des femmes tenus à l’écart d’une part considérable du patrimoine culturel de l’humanité, et empêchés de développer pleinement leurs capacités personnelles et leur qualification professionnelle.
Aussi est-ce avec gratitude que je salue les efforts de ceux et celles qui consacrent une part de leur activité à l’alphabétisation sous l’égide de l’UNESCO ou d’autres organisations publiques ou privées. En mettant de plus en plus l’accent sur la qualité de l’alphabétisation et sur la post-alphabétisation, ils rendent à l’homme un réel service.
Par la conception et la réalisation d’un programme complet d’éducation fondé sur la connaissance de la lecture et de l’écriture, l’UNESCO répond d’autant plus aux besoins de notre temps que tous les peuples, même ceux dont la culture demeurait jusqu’ici orale, sont appelés à vivre dans une interdépendance accrue, marquée par l’importance de l’accès aux connaissances scientifiques et techniques. Pour le véritable bien de l’homme, l’initiation aux connaissances élémentaires demande à être accompagnée d’une éducation générale de qualité, afin de permettre aux plus défavorisés d’accueillir les progrès de la science sans porter atteinte au caractère spécifique de leur culture ni déprécier les valeurs positives de leur héritage.
Si l’alphabétisation est pour l’humanité un devoir urgent, elle n’atteindra vraiment ses objectifs qu’en s’insérant dans un programme de développement culturel intégral. Elle est au point de départ d’une action éducative qui doit être persévérante, coordonnée et suffisamment prolongée.
De nombreux gouvernements ont projeté des actions d’envergure au cours de l’année internationale de l’alphabétisation. Je les encourage vivement à œuvrer dans ce sens, car la lutte efficace contre l’ignorance ne peut procéder que d’une politique d’ensemble et de la collaboration généreuse de tous.
Pour sa part, l’Église catholique s’est associée de longue date aux efforts d’alphabétisation, tant dans les pays industrialisés que dans les pays en voie de développement. Dans ses écoles, ses universités et ses centres culturels, elle désire être au service de tous, sans distinction aucune de race, de couleur ou de religion, afin de partager les trésors reçus. En cette année internationale, j’invite tous les catholiques à prendre part aux initiatives destinées à ceux qui sont les plus défavorisés dans le domaine de l’éducation.
Je vous assure, Monsieur le Secrétaire général, de mon appui pour une tâche dont les Nations Unies soulignent opportunément l’urgence et dont l’UNESCO fait à juste titre une priorité. Et je forme des vœux ardents pour qu’il soit permis au plus grand nombre d’hommes et de femmes de bénéficier d’un meilleur accès à la culture afin d’enrichir sans cesse leurs échanges fraternels.