Message de Sa Sainteté le Pape au Directeur général de l’UNESCO pour la journée internationale de l’alphabétisation

Droits et devoirs de l’analphabète : Message de Jean-Paul II à Amadou-Mahtar M’Bow pour la journée de l’alphabétisation

Rome, 5 septembre 1983

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En vue de la journée internationale de l’alphabétisation, Jean-Paul II livre au Directeur général de l’UNESCO sa réflexion sur les droits et les devoirs en matière d’alphabétisation. Le Pape rappelle que l’alphabétisation est un droit fondamental qui permet une meilleure application des droits de l’homme. Il y a donc également un devoir d’alphabétiser et d’être alphabétisé.

À Monsieur Amadou-Mahtar M’Bow,
Directeur général de l’UNESCO,

Le 8 septembre, pour la XVIIe année consécutive, vous invitez à célébrer la journée internationale de l’alphabétisation. Affronter ce problème bien difficile à maîtriser, année après année, sans découragement mais au contraire avec une ténacité inébranlable, manifeste la force de conviction des dirigeants et des membres de l’UNESCO : ils sont à juste titre persuadés que l’alphabétisation est une action essentielle pour promouvoir la dignité humaine, qu’il est possible de l’étendre bien davantage, et qu’il faut développer plus largement cette prise de conscience pour susciter de nouveaux engagements, généreux et judicieux.

Les aspects variés de ce problème de l’alphabétisation ont déjà été abondamment étudiés, confrontés, et les moyens mis en œuvre ont donné des résultats tangibles qui progresseront grâce aux initiatives publiques et privées. Et cela se réalisera d’autant mieux si tous comprennent que la dignité de l’humanité est ici en cause -tous, c’est-à-dire les artisans de ces efforts et les bénéficiaires-, car il s’agit d’un droit et d’un devoir.

On pense naturellement au droit, pour celui qui est défavorisé, à être scolarisé, éduqué, cultivé, adapté au monde dans lequel il doit prendre sa participation active et entière ; et au devoir, pour celui qui est mieux nanti, de partager ce que, en fin de compte, il possède surtout grâce aux chances de son histoire et aux efforts de ses aïeux.

Mais l’analphabète a aussi le devoir d’exiger de lui-même d’abord et des autres que se fasse cette initiation primordiale, et d’y travailler activement.

Cette journée internationale de l’alphabétisation ne devrait-elle pas rendre les hommes encore plus convaincus des grands principes qui commandent leurs droits et leurs devoirs ?

D’abord, tous les droits sont indissolublement liés entre eux et, dans la mesure où ce droit à l’alphabétisation est encore négligé, c’est la revendication des autres droits de l’homme qui en est d’autant retardée ou minimisée.

Par ailleurs, tous les hommes sont solidaires et, dans la mesure où certains, dans quelque partie du monde ou dans un quelconque secteur de leurs vies, voient leurs droits bafoués, c’est l’humanité entière qui est atteinte dans sa dignité.

Enfin, tous les droits sont liés à des devoirs et, là où on néglige de s’acquitter du devoir, le droit correspondant demeure sans effet :
s’il y a le droit à la vie, il y a le devoir de favoriser et de protéger la vie ;
s’il y a le droit à la paix, il y a le devoir de faire la paix ;
s’il y a le droit à la liberté, il y a le devoir de rendre libre ;
s’il y a le droit à l’alphabétisation, il y a le devoir d’alphabétiser et de chercher à être alphabétisé.

Il faut souhaiter, Monsieur le Directeur général, que les nations fassent largement écho à la célébration de la XVIIe journée internationale de l’alphabétisation de votre organisation, pour laquelle je forme des vœux de plein succès. Puissent-elles trouver les moyens de sensibiliser l’opinion publique à la grande misère que représente, pour des adultes ou pour des enfants, le fait de demeurer analphabète, un peu comme l’est, au plan de la santé du corps, la malnutrition, elle aussi dramatique ! Puisse-t-on s’engager davantage, pour susciter et développer, chez soi et dans les pays les plus défavorisés, les initiatives adéquates, nationales et internationales ! Je veux espérer qu’une telle Journée, que de tels efforts contribueront à permettre à un grand nombre d’hommes de surmonter le handicap de ne savoir ni lire ni écrire, à leur permettre ainsi de mieux participer à la culture et à la vie de toute la société, et de trouver également un meilleur accès aux réalités spirituelles, exprimées elles-mêmes dans les Livres saints. Je sais qu’un tel progrès rejoint le plan de Dieu.